POURQUOI UN ENFANT PEUT REJETER EN TOTALITE UN DE SES PARENTS ALORS QUE CELUI-CI EST UN PARENT NORMALEMENT SATISFAISANT (NON MALTRAITANT) ?

Publié le 1 Novembre 2017

 

Le fait de voir un enfant rejeter un parent a un terme : Le syndrome d’aliénation parentale ou aliénation parentale. 
Parce que le SAP, syndrome d’aliénation parentale, est un terme controversé, son existence et ses conséquences sont décriées voir ignorées. 
Quelle est cette controverse ? Pourquoi ce terme - ou cette pathologie – n’a pas sa place auprès de la justice et n’est pas reconnu par l’ensemble des intervenants médico-sociaux ? 
Quand doit-on déterminer si les arguments de l’enfant sont pertinents ? Doit-on répondre positivement à la demande de l’enfant ? 
Quelles sont les conséquences à court-terme et à long-terme sur l’enfant ? 

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SOMMAIRE

Comment penser ce problème de rejet d’un parent par un enfant ?
Pourquoi le père est-il celui que l’enfant choisit de rejeter ?
Pourquoi ce rejet émerge dans les contextes de séparation / divorce ?
Mais pourquoi le rejet n’émerge t-il pas dans tous les cas de séparation / divorce ?
Comment un parent peut-il instrumentaliser la situation de divorce pour s’assurer le rejet de l’autre parent par l’enfant ?
Comment décider si un enfant doit ou non continuer à voir le parent non gardien ? Doit-on répondre positivement à sa demande ?
1. Y a-t-il des éléments réels, objectifs et proportionnels qui viennent justifier le rejet ?
2. L’enfant a-t-il pensé les éléments de justification par lui-même ?
3. La formulation des arguments correspond-elle à celle d’un enfant de son âge ?
4. L’absence de culpabilité à l’idée de faire souffrir le parent rejeté.
5. L’enfant est-il capable de reconnaître un élément positif chez son parent rejeté ?
6. Le rejet est généralisé à l’ensemble de l’entourage et de la famille du parent rejeté
7. L’enfant se présente comme le garant du bien être du parent non rejeté
Les biais à éviter lorsque l’on doit prendre une décision sur un enfant qui refuse de voir un de ses parents :
Risque pour l’enfant à court-terme :
Risque pour l’enfant à long terme :

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Le fait de voir un enfant rejeter un parent a un terme : Le syndrome d’aliénation parentale ou aliénation parentale. 

CONTROVERSE : 
1. Tout le monde n’a pas la même définition. Certains allèguent que le SAP est la combinaison d’une campagne de dénigrement de la part d’un enfant contre l’un de ses parents et d’un lavage de cerveau de la part de l’autre parent afin de renforcer le rejet. D’autre se cantonnent à observer qu’un enfant peut rejeter en totalité un parent sans arguments, motifs appropriés ou proportionnés par rapport à l’intensité du rejet… Et ainsi de suite !!
2. Parce que le phénomène se retrouve essentiellement dans le rejet du père. Et l’une des explications à ce rejet serait que la mère participe à ce processus d’annihilation du père. Des femmes travaillent alors activement à défendre la cause maternelle et, sans nier l’existence du S.A.P, en diminue sa fréquence et son intensité. 
3. Comment justifier qu’un enfant rejette un parent sans que cela ne soit justifié ? Le parent rejeté, le père, a forcément fauté (maltraitance, abus, négligence…). Et puis, « la vérité sort de la bouche des enfants ». Sans compter que les abuseurs tendent à nier et à accuser la victime d’affabulation et de mensonge !! 
4. Le S.A.P n’appartient à aucune classification officielle. Elle n’est pas reconnue par le DSM4 (l’outil de classification qui permet de définir le plus précisément possibles les troubles mentaux et donc d’établir un diagnostic). 
5. Le S.A.P est-il une pathologie de l’individu ou est-il un élément qui permet de révéler une pathologie familiale ? 
6. Doit-on l’observer en tant que syndrome ou en tant que symptôme ? Un syndrome est un ensemble de signes cliniques et de symptômes qu'un patient est susceptible de présenter lors de certaines maladies, ou bien dans des circonstances cliniques d'écart à la norme pas nécessairement pathologiques. Le rejet d’un parent est-il un élément dans une pathologie ou est-il la pathologie diagnostiquée par un ensemble de symptômes ? 
7. Richard Gardner est le psychiatre qui a découvert ce syndrome et il est décrié pour plusieurs raisons. Il n’a pas été salarié dans une université comme il le disait mais bénévole. Il n’a pas fait publier ses écrits par une maison d’édition mais a fondé la sienne afin de publier ses écrits. Il n’a pas réussi à faire reconnaître sa découverte du temps de son vivant. Il serait un homme misogyne et aurait expliqué les paraphilies sexuelles (la pédophilie, le sadisme, le viol, la nécrophilie, la zoophilie, la coprophilie…) comme stimulant pour la reproduction. 
Ces controverses viennent paralyser la prise en compte de ce trouble. 
Il s’agit de souligner qu’un enfant peut rejeter un parent sans motif raisonnable et cela suffit à ce que nous réfléchissions. 

Comment penser ce problème de rejet d’un parent par un enfant ?

Dans les contextes de séparation / divorce et uniquement dans ces contextes, la justice et les psys doivent composer de plus en plus avec des enfants qui rejettent un de ses parents. La plupart du temps, ni les juges et avocats, ni les psychiatres et psychologues, ne connaissent le phénomène. Ils tendent donc à écouter la demande de l’enfant, et démunis, dans l’incompréhension, entérinent le droit à rompre le lien avec un parent. 

Pourquoi le père est-il celui que l’enfant choisit de rejeter ? 
Le père est-il un plus mauvais parent ? Est-il un individu perçu comme néfaste par l’enfant ? Et enfin et surtout, cette perception est-elle fondée ? 
C’est en s’appuyant sur des statistiques, que nous comprendrons pourquoi le père est celui qui est le plus souvent rejeté par l’enfant. Après la séparation, 80% des enfants sont confiés en résidence principale chez la mère. 
Et c’est justement parce que 80% des enfants sont chez la mère qu’ils rejettent le père. Les femmes ne sont pas plus mauvaises que les hommes, mais les enfants rejettent le parent absent - celui-là même qui est plus impuissant à se défendre. Par ailleurs, l’enfant, chez sa mère, est au cœur de la souffrance de celle-ci, dans son quotidien et va s’identifier à elle plus en totalité. L’identification au père est difficile compte tenu du peu temps passé avec l’enfant. 
C’est donc bien plus un mode de garde qui facilite l’émergence du rejet d’un parent que le sexe du parent. Il est néanmoins possible, mais beaucoup plus rare, de voir un parent gardien totalement rejeté par l’enfant. 

Pourquoi ce rejet émerge dans les contextes de séparation / divorce ? 
Pendant la phase de séparation et celle qui suit, les parents ne sont plus les parents connus par l’enfant. 

Maman, normalement si douce et attentive (ou autre), est devenue une femme absente qui pleure, qui crie, qui se replie, qui s’impose, qui dispute, qui … Bref, ma maman mais c’est plus vraiment ma maman ! 
Papa, lui, qui jouait tant et qui se préoccupait de moi (ou autre), oublie de jouer, de questionner, n’a plus le temps de donner le bain, m’amène à l’école replié sur lui-même. Bref, mon papa mais plus vraiment mon papa ! Et puis, papa est parti, il habite ailleurs et je le vois moins. 
Alors, l’enfant qui ne comprend pas grand-chose à ces histoires de grands, est fragilisé tout autant que ses parents. En plus, l’enfant n’a pas fini de se construire (quel que soit l’âge, même à 18 ans) et en temps normal il se réfère à ses parents pour décider de ce qui est bien ou mal. Là, dans ce contexte, il se retrouve face à une perte de valeurs. Les deux parents se contredisent, se chamaillent, les habitudes, à savoir les éléments de sécurité familiaux, sont rompus… Lequel a raison ? Lequel est bon ? Lequel sera garant de sa santé psychique ? 

L’enfant fragilisé va devoir se tourner vers l’un de ses parents. Il va devoir choisir lequel des deux sera le moins dangereux pour son équilibre. Et le choix ne portera pas forcément sur celui qu’il préfère mais sur celui chez qui il vit car c’est celui-là même qui sera garant de son quotidien.

Rappelons que nous sommes dans un contexte où aucun parent n’est maltraitant, négligent ou abusif. Nous sommes face à des parents normalement satisfaisants mais temporairement perdus dans ce contexte de séparation. L’enfant choisit le parent gardien car il est celui qui va pourvoir à ses plus grands besoins et il est celui qui peut faire de sa vie un havre de paix ou un enfer. Le parent gardien a donc un ascendant supplémentaire sur l’enfant. L’enfant perd donc sa liberté de préférer tel ou tel élément, tel ou tel parent. Il ressent qu’il doit prendre le parent gardien en totalité. 

Le processus de rejet commence souvent par des choses simples et sans volonté de nuire. Par exemple, lorsque l’enfant part chez son père, il est naturel pour la mère de se questionner sur la qualité de vie de son enfant chez l’autre. Le « chez l’autre » est mystérieux, alors on imagine et on crée de l’inquiétude. On se voit dire à l’enfant « quand tu est chez …., tu m’appelles. Tu me dis si tout va bien. Si tu as peur tu m’appelles… Je peux venir te chercher si il y a un problème ». Qu’entend l’enfant ? Chez l’autre il y a un potentiel danger alors qu’ici je suis en sécurité. L’enfant se met alors à observer ce qui cloche chez l’autre, ce qui peut produire de l’inquiétude et le rapporte alors chez la maman. Celle-ci, dans sa peur de perdre de sa place auprès de l’enfant, va alors, consciemment ou inconsciemment, l’utiliser pour s’assurer l’amour de son enfant. L’enfant voit alors un parent bienveillant voulant le protéger d’un autre parent potentiellement dangereux. Le processus est enclenché et selon la qualité de la relation entre le père et l’enfant et selon l’histoire, le rejet se mettra en place plus ou moins rapidement et plus ou moins profondément. 

Mais pourquoi le rejet n’émerge t-il pas dans tous les cas de séparation / divorce ?
Si le parent gardien rappelle à l’enfant que malgré la situation de séparation et la guerre entre les deux adultes, l’autre parent a toujours sa place et doit être respecté, le rejet ne pourra être mis en place. Je dirais que pour qu’un enfant décide de ne plus voir son père de manière radicale, c’est que l’autre parent l’a autorisé, soit en laissant faire, soit par volonté de nuire.

Souvent le parent gardien insiste pour que l’enfant aille voir son autre parent, mais il n’impose pas à l’enfant de le faire. Il suffirait pourtant de dire à l’enfant « c’est ton père, tu iras et c’est comme ça. Il n’est peut-être pas le père idéal pour toi mais cela reste ton père. Tu es un enfant et ce n’est pas à toi de décider ce qui est bien pour toi. Je parlerai ou ferai un mail à ton père pour qu’il fasse des efforts ». Ainsi, l’enfant entend : 
- le respect maintenu pour le père, 
- le rappel de sa place dans la famille
- le rappel du système des valeurs familiales
- que le parent gardien a entendu sa plainte et se sent concerné
- que le dialogue entre les parents n’est pas totalement rompu même si cela doit se faire par mail

Auparavant, il était interdit à l’enfant de mal parler à un parent ou de refuser une activité… Pourquoi soudainement donner ce pouvoir à l’enfant. 

Ce qu’il est important à comprendre ici, c’est qu’en voulant bien faire - laisser faire et accepter de transformer les règles de base (politesse, respect du parent.. .) - le parent gardien renforce le sentiment de pouvoir de l’enfant et permet la création du rejet. La justice en donnant une résidence exclusive à l’un des parents se rend complice de cette émergence, … mais la justice ne comprend pas ou ignore cette problématique !! 

L’émergence du phénomène de rejet dépend donc de la gestion et du maintien par la mère des valeurs et habitudes. Certaines mères laissent faire, non pas dans le but de nuire au père, mais dans la croyance naïve qu’il fait compenser la perte liée à la séparation / divorce.
Mais, il existe des mères qui comprennent le pouvoir qu’elles ont sur l’enfant et sur l’espace temps dont elle dispose avec lui. 

Comment un parent peut-il instrumentaliser la situation de divorce pour s’assurer le rejet de l’autre parent par l’enfant ? 
Il est en effet possible de voir certains parents manipuler les enfants dans le but de s’assurer la « propriété » de celui-ci. 

Pour le parent gardien, il est très facile de monter l’enfant contre son autre parent, surtout si la mère a une tendance surprotectrice et intrusive. 

Il lui suffit de : 
- dénigrer ouvertement l’autre parent ;
- partager avec l’enfant les problèmes d’adultes (et surtout ceux liés à la séparation), ce qui le valorise l’enfant et induit en lui le sentiment qu’il bénéficie d’une relation plus particulière avec sa mère ; 
- se positionner comme victime de l’autre parent ;
- interpréter négativement chaque dire et action de l’autre parent. « Ton père n’est pas venu, tu vois, il t’abandonne » ou « ton père est venu, tu vois, il ne respecte pas ton souhait ». L’autre parent est disqualifié quoiqu’il fasse ;
- Isoler l’autre parent : ne pas maintenir de lien téléphonique ou physique, ne pas respecter les droits de visites et d’hébergement, ne pas maintenir le lien avec la famille étendue de l’autre parent ;
- Ne pas informer ou désinformer l’autre parent des activités scolaires ou parascolaires, des RDV médicaux, … ;
- Fédérer un entourage anti-père qui s’exprime ouvertement devant l’enfant ;

Il arrive que sans le vouloir, chacun des parents applique certains de ces éléments temporairement (quelques mois et ce tout en imposant le respect de l’autre parent. Il existe une période où sans le vouloir, la guerre juridique rend les parents intraitables et insensibles mais cela ne les rend pas pour autant aliénant). C’est la chronicité et la durée de l’association de plusieurs de ces éléments qui vont permettre l’émergence du sentiment de rejet de la part de l’enfant. 

L’autre parent, le père le plus souvent, se retrouve démuni face au rejet de son enfant. Ayant déjà peu de temps avec son enfant, il ne sait comment modifier sa perception. Il se sent piégé et pressent vite que tout sera interprété contre lui. Il est de plus en plus isolé et de ce fait de plus en plus fragile et moins amène pour rétablir une vérité. La spirale descendante est enclenchée et chacun, le père, la mère et l’enfant perd le contrôle sur les événements à venir. 

Comment décider si un enfant doit ou non continuer à voir le parent non gardien ? Doit-on répondre positivement à sa demande ? 
Se peut-il qu’un enfant rejette son parent quand celui-ci n’a rien fait de répréhensible ? Nous savons tous que la séparation est le lieu privilégié des rancunes, angoisse et réactivation des problématiques refoulées.

Rappelons-le, un enfant, même à 18 ans, n’est pas capable de comprendre les conséquences de ses actes et de ses paroles. Il n’a pas accès à tous les éléments pour prendre sa décision et il n’en a pas la compétence. 

Lorsqu’un enfant rejette un parent, il n’a pas conscience de la spirale descendante qu’il lance. L’enfant n’a pas la capacité à avoir une vue d’ensemble sur des problématiques familiales et encore moins en situation de divorce. Ce seul argument devrait limiter la parole de l’enfant à ce qu’elle est : une parole signifiée là et maintenant dans un contexte conflictuel entre ses deux parents sans que celui-ci ne comprenne réellement les enjeux. 

Et quant est-il d’un adolescent ? L’argument s’applique également. Il ne sait pas encore faire la part des choses. Tout un chacun estime qu’un adolescent dit des choses qui dépassent sa pensée pour provoquer et tester les limites. Et dès qu’il s’agit de rejet du parent, on devrait considérer qu’il a mesuré sa demande, qu’il en comprend les conséquences. Quels adultes sommes-nous pour dire tout et son contraire sur les jeunes ?

J’aurais donc tendance à réfuter la demande de l’enfant. Mais, comment avoir la certitude que nous ne remettons pas l’enfant à un parent nocif ? 
Plusieurs éléments sont à investiguer :

1. Y a-t-il des éléments réels, objectifs et proportionnels qui viennent justifier le rejet ?
Si un enfant, et ce quelque soit son âge, rejette un parent, il s’agit avant tout d’investiguer sur les motifs de son rejet. Le parent a-t-il été maltraitant ? A-t-il battu ? A-t-il négligé ? A-t-il abusé sexuellement ? A-t-il développé une relation malsaine avec son enfant ? En bref, les plaintes de l’enfant sont-elles recevables ? 
Afin de décider si oui ou non il faut acter la demande de rejet d’un enfant, le juge et le psychologue devront déterminer si l’enfant dénigre le parent de façon persistante alors que cette attitude ne trouve pas de justification dans les faits. 

Il faut souligner également qu’un enfant maltraité a tendance à trouver des points de défense à son parent maltraitant et tend même à s’enfermer dans un silence sacrificiel afin de ne pas risquer de perdre le peu d’éléments positifs dans sa relation à son parent. Lorsque l’enfant dit ouvertement la maltraitance et demande à vivre ailleurs, il n’est pas rare d’ailleurs de voir un enfant maltraité demander à maintenir le lien avec son parent maltraitant mais dans un espace sécurisé. Un enfant maltraité aime son parent malgré tout. Néanmoins, les arguments sont réels, concrets et surtout proportionnels à la demande de l’enfant. 

Comment faire quand l’enfant se plaint de maltraitance psychologique ? Comment déterminer si elle est réelle de la part du parent ? Il est difficile d’établir un diagnostique psychologique, et ce d’autant plus qu’il est lié à la perception de l’enfant qui raconte et au déni du parent. Il s’agira alors d’obtenir des éléments objectivables qui se trouvent répétés dans la durée : 
- humiliations verbales ou non verbales répétées
- comportement visant à la dévalorisation systématique
- attitude de marginalisation
- persécution par des moqueries et des brimades
- Isolement de l’enfant dans la vie familiale et sociale
- Menaces et chantages affectifs
- Exigences éducatives excessives, irréalisables avec une mise en échec
- Punitions abusives et aberrantes
- …
En bref, la question à élucider est la suivante : Les éléments de plaintes sont-ils disproportionnés par rapport à la demande ? 
Par exemple, un enfant qui exprime un sentiment de haine, de crainte, de rejet…par rapport à son parent parce que celui ne venait jamais à ses match de foot ou parce qu’il n’avait pas le droit de faire venir des copains chez lui ou encore parce que l’enfant avait peur que son père se mette en colère quand il revenait avec des mauvaises notes ou colles…etc. 

2. L’enfant a-t-il pensé les éléments de justification par lui-même ? 
Les arguments évoqués sont-ils trouvés par lui-même ou insufflés par une personne extérieure ? Il s’agit ici de regarder si les arguments correspondent à la maturité naturelle d’un enfant. 
Par exemple, un enfant de 4 ans accuse son père de l’avoir secoué quand il était bébé. Tout d’abord, l’enfant ne peut avoir la mémoire de l’évènement. Depuis quand sommes nous capables de souvenir de bébé ? Nous sommes donc en droit de nous demander d’où sort cette accusation ? 
Ou encore, des enfants qui accusent un parent de ne pas donner d’argent au parent gardien pour les nourrir alors que le parent gardien est aisé, et l’autre à la rue…etc.

3. La formulation des arguments correspond-elle à celle d’un enfant de son âge ? 
A chaque âge correspond une compétence en linguistique et en communication. Un enfant de 9 ans m’a dit un jour qu’il a du fuguer à 3 ans et demi de chez sa mère et que sa mère a porté plainte contre son père car il est parti se réfugier chez lui. A-t-on jamais vu un enfant de 9 employer un tel vocabulaire ? 

4. L’absence de culpabilité à l’idée de faire souffrir le parent rejeté. 
Un enfant culpabilise lorsqu’il se confronte à son parent de manière négative. Même à l’adolescence où l’enfant agresse sous différentes forme ses parents, il culpabilise. C’est d’ailleurs souvent ce qui entraine des spirales de conflits entre l’enfant et ses parents. Mais, l’enfant finit souvent par revenir vers son parent et tente de se rattraper … jusqu’à la prochaine crise. 
Un enfant qui critique ouvertement, sans aucun signe de culpabilité, son parent et persiste à le mettre à mort avec des arguments légers tels que « il s’endormait à mes spectacles » ou « il voulait que je fasse du tennis alors que je ne voulais plus », est un enfant qui s’est déconnecté de la réalité de la relation à son parent.

5. L’enfant est-il capable de reconnaître un élément positif chez son parent rejeté ? 
Toute enfant, même maltraité, réussi à trouver des éléments positifs chez son parent. Il cuisine bien. Il m’aide à faire mes devoirs. Il m’a donné le gout du dessin…etc. Peu importe !! Un enfant à qui on demande de décrire un élément positif du parent rejeté, souvent n’y arrive pas. En effet, le rejet étant si irrationnel et total que l’enfant a oublié que le mois dernier, il adorait jouer au foot avec son père. Il dira « mon père me forçait tous les mercredis à jouer avec lui. Maintenant, je ne veux plus jouer à cause de lui ». 

6. Le rejet est généralisé à l’ensemble de l’entourage et de la famille du parent rejeté
Alors que l’enfant était proche d’un ami, d’un grand-père, d’une tante, il est soudainement dans le rejet de ces individus également. Ces individus sont identifiés au parent rejeté et sont repoussés avec la même force et absence de culpabilité. 


7. L’enfant se présente comme le garant du bien être du parent non rejeté
Alors que l’un des parents est rejeté, l’autre est décrit comme fragile et nécessitant du soutien. L’enfant a le sentiment que dépend de lui la survie du parent gardien. Il intègre en totalité les paroles du parent non rejeté. Par exemple, un parent dit à son enfant que papa est un alcoolique (ce qui est faux) et l’enfant tout content de dire à sa mère qu’il l’a vu boire (un apéritif innocent avec des amis).

Comment doit-on interpréter la parole de l’enfant ? A quel point doit-on s’en accaparer ? Quel degré de pouvoir de décision doit-on laisser à l’enfant ? 

A mon sens, le premier élément, celui du rapport entre l’argument et le rejet, est celui auquel il s’agit de faire le plus attention. Il est le plus simple et le plus objectivable. Un enfant qui rejette en totalité son parent pour des motifs disproportionnés ne doit pas être entendu. Un enfant dont la justice ou le corps médical, a accordé sa demande voit son rejet renforcé et conforté. Faute d’aider à maintenir le lien entre l’enfant et le parent, la décision vient finir de le briser. Entendre l’enfant ne signifie pas accepter aveuglement sa demande mais la prendre en compte. Il s’agit alors de lui faire remarquer que nous comprenons en compte sa difficulté mais que la décision étant très grave, il a été décidé de maintenir le lien tel qu’il était auparavant avec son parent. Il s’agit également de rappeler à l’enfant que le rôle d’un parent est de s’assurer du maintien du lien entre l’enfant et l’autre parent. Il s’agit d’ajouter que le parent défaillant dans le maintien de ce lien devra rendre des comptes. On peut l’expliquer par des choses simples comme les règles de politesse intrafamiliales : Alors que le couple était marié et heureux, aucun n’aurait accepté que son enfant refuse de dire bonjour, au revoir ou bonne nuit à l’autre parent. Les deux seraient restés solidaires pour faire entendre les règles de respects auprès du parent… et plus exhaustivement de la vie. Ce respect de l’autre parent doit perdurer malgré la séparation. 

Les biais à éviter lorsque l’on doit prendre une décision sur un enfant qui refuse de voir un de ses parents : 
- ternir compter uniquement de l’avis de l’enfant lorsqu’il refuse de voir son parent. « Dans l’intérêt de l’enfant »… Beaucoup de psy, de juges et d’intervenants du social pensent justifié de répondre positivement à sa demande. Mais cela induit malheureusement une distorsion des valeurs chez l’enfant. Celui-ci, non conscient de ce qu’il demande et de ses conséquences (je rappelle que, selon Piaget, un enfant a finit d’acquérir la pensée abstraite vers 16 ans et donc la notion de projection dans le futur et de vue globale), se retrouve maitre de son destin mais surtout il pense avoir le pouvoir sur le monde des adultes. 
- Espérer que les deux parents pourront s’entendre. Si l’enfant en est arrivé à ne plus vouloir voir un de ses parents, c’est que l’autre sans même vouloir nuire à ce parent, n’a pas su imposer son autorité de parent et a laissé faire. Que ce soit par démission ou par volonté de nuire, l’autre parent a forcément participé. 

Risque pour l’enfant à court-terme : 
En apparence, tout va bien, l’enfant travaille bien à l’école, socialise, dort bien, mange bien, est affectueux, … mais l’enfant a perdu de sa capacité à rebondir, de sa capacité à s’adapter sainement à l’environnement
L’enfant passe entre 4 à 8 jours chez son père et est au centre d’une campagne de dénigrement et de mise en exergue de toutes les failles d’un parent. Il est parallèlement gratifié par le parent gardien. 
Normalement, dans un contexte sensible, douloureux, l’enfant utilise des résiliences. La résilience est une aptitude à rétablir un équilibre émotionnel lorsque l’on subit des moments de stress ou des abus importants. 
Les résiliences utilisées par les enfants en situation de stress sont en général : 
- l’indépendance qui est basée sur la capacité d’établir des limites entre soi et les individus néfastes. Il s’agit pour l’enfant de mettre à distance intuitivement les individus qui leur sont néfastes. 
- La prise de conscience qui est la capacité à évaluer les problèmes et à trouver des solutions. Par exemple, dans le contexte de conflits entre les parents séparés, l’enfant va apprendre à dire et ne pas dire en fonction des attentes de chaque parent. Il a compris le besoin de chaque parent, identifié les risques quand il affirme son soutien à l’autre parent, et donc crée une compétence aux mensonges et à l’adaptation pour pouvoir maintenir une relation satisfaisante et non nocive avec chacun de ses parents. 
- Le développement des relations satisfaisantes avec des individus en bonne santé mentale. L’enfant saura intuitivement aller vers des individus qui l’aideront à trouver un équilibre et un environnement serein. 

Malheureusement, avec la campagne de dénigrement et l’angoisse de perdre le parent gardien, l’enfant biaise, pervertit ses résiliences afin de venir conserver ses privilèges avec le parent gardien. Il y a donc une distorsion de la capacité à évaluer la réalité et à rebondir. L’enfant perd donc de ses compétences pour pouvoir survivre. 
- l’indépendance est mise à mal car l’enfant se retrouve entouré d’individus qui tous ont pour préoccupation le rejet du parent non gardien. Le parent gardien approuve et renforce cet entourage et envahi (volontairement ou non) la liberté de juger de l’enfant. Il perd donc sa capacité à estimer ce qui lui est positif ou non et perd au passage cette résilience essentielle pour sa construction. 
- La prise de conscience devient inexistante car on a retiré à l’enfant cette capacité à juger l’environnement et donc s’adapter à celui-ci. 
- Le développement des relations satisfaisantes avec des individus en bonne santé mentale devient impossible car toute personne saine viendrait questionner les motifs irrationnels du rejet. L’enfant se repli sur lui et son environnement anti-autre-parent.

En fait, les aptitudes résilientes existent toujours mais sont mises au service de la rupture avec l’un des parents et de la survie avec le parent gardien. 

En excluant le père, il ne choisit plus les personnes qui lui sont bienveillantes et intègre comme normal les individus dans la critique et la colère. L’enfant, par ailleurs, participe activement à cette campagne de dénigrement et ainsi se piège car il ne pourra plus revenir en arrière. 
Il est important de comprendre que l’enfant, même à 18 ans, ne maitrise en rien la situation. Il met en place une résilience pervertie afin de survivre. Son quotidien est en jeu et l’amour du seul parent qui lui reste le seul et unique pilier dans sa construction identitaire. Sans compter que l’enfant est amputé de l’identification à son père…

Il a perdu également sa naïveté et sa spontanéité qui sont souvent remplacées par une forme de cynisme.
Il gagne en paranoïa, en appréhension, en rancune, la perte du sentiment d’identité, la perte de l’estime de soi…
Tout cela va créer un nouveau mode de fonctionnement biaisé, tronqué qui sera la marque de ses relations futures. 

Risque pour l’enfant à long terme : 
L’enfant peut développer pendant la période où il ne voit pas son père ou sa mère des troubles psychopathologiques, psychosomatiques et relationnels tels que l’impossibilité de gérer une relation à plusieurs, l’incapacité à gérer un conflit mais également une perte considérable de la confiance en soi. L’enfant perd sa capacité à juger, à estimer les événements et les individus et doit donc s’en remettre à un autre pour prendre des décisions. Un risque de dépendance en naît et risque d’induire à long-terme un penchant pour l’alcool, la drogue et toute autre forme de dépendance. 

A l’âge adulte, l’enfant ayant rejeté un parent, parce qu’il a appris à ne s’en remettre qu’à un parent au détriment de ses propres besoins, aura une tendance à avoir des relations basées sur le mode soumission / domination. On retrouvera des angoisses de rapprochement et des difficultés à tolérer l’intimité psychique. Ces angoisses viennent en quelque sorte protéger l’adulte du risque de se voir voler, encore une fois, son identité en partie ou en totalité.

La psychothérapie sera même difficile à définir si le psychothérapeute n’est pas formé à cette problématique. En effet, l’abus psychologique et profondément narcissique fait à l’enfant a été caché derrière une relation d’amour forte au parent gardien. L’adulte aura tendance à ne pas parler du parent absent et à ne valoriser que le parent gardien. 

Elodie Cingal, psychothérapeute
www.psy-conseil-divorce.com

 
 

Rédigé par hl_66

Publié dans #Réflexion

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B
Je suis une maman qui n' a pas vu son fils depuis 6 ans...mon histoire est longue aussi je ne l' a raconterai pas Ici. Je souffre immensément de ce rejet à chaque instant, je n'ai jamais compris pourquoi...et puis il y a quelques jours je suis tombée sur 1 article qui traitait d' aliénation parentale.Je me suis entièrement reconnue....je tombe des nues..tout est là, tout est dit...mon dieu, qui pourrait m'aider maintenant ?
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S
De nombreuses meres aimantes et devouees sont victimes du SAP et les enfants instrumentalises par un pere ex mari qui poursuit ainsi sa violence et maltraitance vis a vis de son ex femme . leur souffrance est immense et elles ont hontes alors qu elles sont victimes. comme des femmes battues.
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