Vous ne le savez pas mais vous consommez beaucoup plus de sucre que ce que votre corps peut accepter
Publié le 1 Avril 2018
L'OMS recommande de ne pas dépasser 10% de calories quotidiennes en sucres libres. Aujourd'hui nous dépassons allègrement ce seuil pour atteindre parfois les 40%.
Les sucres de notre alimentation sont principalement le sucre de table (saccharose constitué d'une molécule de glucose et d'une molécule de fructose), le glucose (venant du sirop de glucose ajouté, des fruits et du miel), le fructose (venant du sirop de fructose ajouté, des fruits et du miel) et le lactose du lait (constitué d'une molécule de galactose et d'une molécule de glucose). L'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) recommande de ne pas dépasser 10% de calories quotidiennes en sucres libres, idéalement 5% (soit 25 grammes ou six cuillères à café par jour). Les "sucres libres" sont les monosaccharides (glucose, fructose) et les disaccharides (saccharose ou sucre de table) ajoutés aux aliments et aux boissons par le fabricant, le cuisinier ou le consommateur, ainsi que les sucres naturellement présents dans le miel, les sirops, les jus de fruits et les jus de fruits à base de concentré.
Avant l'arrivée des sucres ajoutés industriels l'homme consommait assez peu de sucres, seulement ceux des fruits, du miel et du lait, et encore selon les saisons ou les disponibilités. Or aujourd'hui nous dépassons allègrement ce seuil de 10% pour atteindre parfois les 40% de calories quotidiennes en sucres. Or le glucose en excès se transforme en matières grasses sous-cutanée, donc en gain de poids; mais aussi, de par son absorption très rapide (sucre "rapide"), peut provoquer une insulinorésistance puis un diabète de type 2 à plus long terme. Le fructose en excès se transforme en lipides (triglycérides) dans le foie menant à la stéatose hépatique (foie gras) puis à la stéatohépatite (inflammation du foie qui se surajoute) et à l'insulinorésistance hépatique; entraînant aussi indirectement une résistance à la leptine (l'hormone de satiété) qui normalement régule l'action de la dopamine, l'hormone du "plaisir", en stoppant sa sécrétion. On est alors rassasié et on n'a même plus envie de continuer à manger un aliment qui nous ferait plaisir. L'excès de glucose et de fructose fait donc le lit de l'obésité et du diabète de type 2, ces deux maladies métaboliques chroniques augmentant ensuite les risques des maladies cardiovasculaires et de certains cancers.
Cependant, outre les sucres simples type fructose, glucose et saccharose, l'amidon très transformé (degré de gélatinisation élevé, matrice alimentaire déstructurée) se transforme aussi très vite en glucose dans l'organisme. Donc consommer des féculents très raffinés ou déstructurés (pain blanc, riz blanc, pâtes très cuites, pommes de terre très cuites et écrasée, céréales du petit-déjeuner pour enfants très transformés) revient à fournir des sucres "rapides" à notre organisme car l'amidon est trop vite digestible. En outre toutes les calories ne se valent pas: ainsi il ne revient pas au même de consommer 5 g de fructose d'un produit très transformé issu de sirop de fructose (lui-même obtenu de la transformation de l'amidon de maïs) que 5 g de fructose issus d'un fruit entier. En effet le fructose des fruits ou du miel apporte aussi fibres alimentaires, minéraux, vitamines et/ou antioxydants, autant de composés protecteurs. Par ailleurs pour manger un fruit il faut le mastiquer, stimulant la satiété. Or le fructose ajouté dans les aliments ultra-transformés n'est pas accompagné des composés protecteurs (on parle de calories "vides") et souvent l'aliment est moins rassasiant et plus hyperglycémiant, autant de paramètres cruciaux pour la santé humaine. Enfin le fructose des fruits est libéré progressivement dans le tube digestif car il est piégé dans les cellules entourées d'une paroi fibreuse, ce qui n'est pas le cas du fructose ajouté. Pour résumer préférez les sucres simples des aliments peu transformés et consommez des féculents peu transformés types pain complet au levain, riz complet, pâtes complètes, muesli naturel, lentilles, haricots, etc.
Comment en est-on arrivé là? Pour plusieurs raisons: 1) tout d'abord l'approche réductionniste en nutrition qui ne considère l'aliment que comme une somme de nutriment a laissé penser que les nutriments et les calories étaient interchangeables d'un aliment à l'autre, ce qui est faux scientifiquement: le sucre apporté par les aliments ultra-transformés n'est pas le même en qualité que celui d'aliments plus bruts et moins transformés; 2) Nous sommes programmés pour aimer le sucre, notamment dès la naissance, car notre cerveau en a besoin et le nouveau-né consomme le lait maternel contenant du lactose; et le sucre stimule le circuit hédonique via la sécrétion de dopamine, notamment via le fructose qui a un pouvoir sucrant supérieur au glucose: ainsi, ajouter du sucre aux aliments peut nous rendre "addictifs" et pousser le consommateur à surconsommer le produit même s'il n'a plus faim; 3) Les sucres ajoutés par les industriels ont plusieurs fonctions technologiques améliorant la texture (onctuosité), la couleur (brunissement lors du chauffage) et le goût. En outre il est moins cher et plus facile de contrôler le goût avec du sirop de glucose-fructose qu'avec du sucre de table. Au final environ trois plats industriels sur quatre contiennent des sucres ajoutés et on peut trouver du dextrose (glucose) dans du saucisson sec ou du jambon blanc.
On distingue de nombreux termes pour qualifier les sucres industriels: sirop de glucose-fructose, sucre inverti, dextrose, nectar, sirop de blé, glucose, sucre de table (ou saccharose), extraits de malt d'orge... Difficile pour le consommateur de s'y retrouver! Aussi la solution la plus simple est de consommer de "vrais" aliments contenant des sucres naturels ou de sucrer vous-mêmes vos aliments comme les yaourts natures ou le muesli en respectant les recommandations de l'OMS (entre 25 et 50 g de sucre/jour, soit entre 4 et 8 morceaux de sucre n°4/jour). Dans un simple petit-déjeuner composé de jus de fruits, d'un yaourt sucré, d'une céréale du petit-déjeuner pour enfant et d'un café sucré vous avez déjà atteint votre apport maximum en sucres recommandés! Soyez vigilent car pour un jus d'orange vous allez presser trois oranges alors que si vous consommez l'orange en tant que fruit entier vous n'en consommez généralement qu'une; donc avec le jus vous prenez trois fois plus de sucres (plus "rapides" que dans le fruit entier) et moins de fibres et moins de satiété!
Si vous ne cuisinez pas préférez les fruits entiers aux jus, lisez la liste des ingrédients sur les emballages et évitez les plats contenant du sucre alors qu'ils ne devraient pas en contenir. Après, des écarts sont toujours possibles sur une semaine, notamment si vous allez au restaurant. Pas la peine de s'inquiéter.
Pour conclure j'aimerais insister sur le fait qu'il faut davantage cibler la qualité de l'aliment dans sa globalité (approche holistique) que le seul sucre (approche réductionniste). En préférant des aliments pas, peu ou normalement transformés et en évitant les aliments ultra-transformés, en mangeant varié et plus de calories végétales qu'animales (ma règle des 3V pour Végétal, Vrai (aliment), Varié) vous êtes sûr de consommer des sucres de qualité et de ne pas dépasser les 10% de calories quotidiennes recommandés par l'OMS. Ainsi vous n'aurez plus besoin de vous préoccuper du sucre!