Publié le 15 Septembre 2018

 

 

En 2013, le sociologue Gérald Bronner s’alarmait de la propagation massive de rumeurs sur le net, qui sont le fruit d’une dérégulation du marché de l’information et du fonctionnement très ancien de notre cerveau. L’adaptation documentaire de son ouvrage “La démocratie des crédules” sera présentée cette année au festival Pariscience.

 

 

 

D’où est né le projet d’adapter votre livre en documentaire ?

C’est le réalisateur canadien Jean Bergeron, un spécialiste du documentaire scientifique, qui a contacté les PUF pour acquérir les droits du livre et l’adapter. Nous nous sommes rencontrés et nous étions sur la même longueur d’onde. J’ai pu jeter un œil sur le scénario même s’il a fait tout le travail.

Quelle forme prend le documentaire ?

Le film est problématisé, avec la voix off de Jean Bergeron qui explique les grandes lignes du livre, à savoir la conséquence de la dérégulation du marché de l’information sur la diffusion de la crédulité.

Nous aurions pu croire qu’avec la disponibilité de l’information et l’élévation générale du niveau d’étude nous irions plutôt vers une société de la connaissance, or nous nous orientons vers une démocratie des crédules.

C’est ce que raconte ce documentaire avec des interviews de psychologues et de sociologues. Le film dépasse la simple existence du livre.

Qui sont les crédules ?

Le terme crédule ne vise pas à stigmatiser qui que ce soit, car nous sommes tous crédules. La morale qui émerge de mon travail, c’est que tout le monde peut être pris au piège du marché de l’information et du fonctionnement très ancien de notre cerveau. Nous savons depuis toujours que l’homme préfère confirmer ses croyances plutôt que de chercher des informations qui pourraient mettre en danger ses représentations. C’est ce qu’on appelle le biais de confirmation, et ce dernier est amplifié par l’apparition d’Internet. Plus il y a d’informations disponibles, plus il est facile d’en trouver au moins une qui va dans le sens de ses convictions.

En quoi internet a favorisé la diffusion des rumeurs ?

Il y a beaucoup de raisons. D’abord la disponibilité de l’information, mais pas que. La rapidité de cette information fait que la crédulité va se déployer partout, y compris dans des espaces sociaux auxquels elle n’avait pas accès. Auparavant les rumeurs se propageaient surtout par le bouche à oreille, ce qui était très lent.

Aujourd’hui, le jour même des attentats de Charlie Hebdo, il y avait 26 arguments en faveur de la théorie du complot. La revue Science a montré que sur Twitter, les fake news se relayaient 6 fois plus vite que les vraies informations.

Des chercheurs belges ont démontré que ces fake news était également mieux mémorisées que les vraies. Cela a un impact terrible sur la diffusion de l’information donc sur notre vision du monde : l’information influence notre façon de voir le monde et donc de décider.

Certaines personnes remettent constamment en cause les versions officielles. Comment expliquer cela ?

Il y a évidemment une dimension psychologique, mais c’est également dû à la configuration du marché de l’information. Par exemple, ni vous ni moi ne savons exactement ce qu’il s’est passé derrière les attentats de Charlie Hebdo. Nous avons une version officielle, mais il n’y a pas besoin d’être stupide pour en douter.

La version conspirationniste peut s’appuyer sur des dizaines voire des centaines d’arguments, et évidemment certains paraissent troublants. J’appelle cela le “mille feuilles argumentatif”, et Internet a favorisé cela. Des gens passent leurs journées à trouver des anomalies sur des photos ou des vidéos. A un moment donné, cela crée des mille feuilles qui sont très difficiles à contredire. Vous pouvez contredire 1 ou 5 arguments, mais à partir de 50 cela devient difficile et il faudrait y consacrer beaucoup de temps.

Or ceux qui sont prêts à consacrer autant de temps pour ces histoires, ce sont les “croyants” qui diffusent ce genre d’informations. Ils ont une forme de radicalité mentale et une envie de défendre leurs idées. Cela tient beaucoup au fait que ces minorités militantes sont plus actives que la plupart de la population, donc nous les laissons faire et leurs rumeurs se propagent.

C’est le cas des anti-vaccins notamment !

Exactement. Au début des années 2000, 9% des Français se méfiaient des vaccins. Aujourd’hui, ils sont près de 40%. Cette année la rougeole a ressurgi et des gens en sont morts. C’est la conséquence de la baisse de la couverture vaccinale. Les personnes anti-vaccins font parties des small worlds (“petits mondes”) : des groupes particulièrement actifs qui n’ont pas nécessairement de connaissances techniques sur le sujet. Le doute peut ensuite venir très vite dans la tête des familles, car la crédulité est loin d’être la stupidité.

Y a-t-il des solutions ?

cerveau

 

cerveau – shutterstock

L’ONU considère ce phénomène comme un problème mondial majeur. Il y a 3 grands types de solutions. D’abord, il faudrait que les individus compétents prennent leur place dans le système d’information. Ces derniers laissent faire faute de temps, et donc des minorités arrivent à convaincre des indécis. Les spécialistes doivent devenirs militants pour démentir ces fake news.

Ensuite, il faudrait réfléchir à une nouvelle architecture du marché de l’information. Sur beaucoup de sujets lorsqu’on utilise Google, on s’aperçoit que parmi les 30 premiers résultats figurent 60 à 70% de sites qui défendent la croyance plutôt que la science. L’une des solutions serait de songer à l’ordre d’apparition de l’information et de penser le référencement comme un acte politique. C’est une chose à laquelle il faut réfléchir avec les Etats et les GAFA.

Pour finir, l’éducation des esprits, c’est à dire l’éveil de la pensée critique, est primordiale. Il s’agit de stimuler le système immunitaire intellectuel, notamment chez les jeunes qui croient le plus facilement ce qu’ils lisent sur internet. L’Education Nationale a le devoir de se saisir de ces questions.

Certains enseignants se sont déjà saisis de ces questions…

Effectivement, beaucoup font un travail formidable, mais je pense qu’il faut aller encore au-delà. Ces initiatives n’ont pas été testées scientifiquement, et parfois nous ne savons pas si elles ne font pas plus de mal que de bien. Il ne suffit pas de faire des cours d’éducation aux médias où l’on étudie des fakes news. Il faut être plus radical que cela, en apprenant aux élèves le fonctionnement de leur cerveau et l’empire des biais cognitifs et des erreurs de raisonnement type.

Un jeune de 14 ans qui croit aux théories du complot à propos de Charlie Hebdo ne croira pas un simple cours d’éducation aux médias. Au contraire cela risque de renforcer sa croyance.

Plutôt que de combattre les théories du complot, il faudrait combattre le type d’arguments sous-jacents de celles-ci. Par exemple la confusion entre corrélation et causalité, l’argument de type “à qui profite le crime”(1) qui est souvent fautif. Cela permettrait aux jeunes esprits de reconnaître ces structures argumentatives que l’on trouve sur Internet et de s’en méfier. C’est un travail de titan qu’il faudrait faire du CP à l’Université.

Pariscience 2018 dans le cadre du Festival Scolaire, du 15 au 19 octobre, qui aura lieu à l’Institut de physique du globe de Paris, séance scolaire pour les lycéens, lundi 15 octobre, 15h15-16h45,  « Notre cerveau, siège ou piège de notre intelligence« 

 
Note(s) :
  • (1) L'argument "à qui profite le crime" fait référence aux complotistes qui pensent que les attentats sont organisés par les Etats pour imposer ensuite des lois restrictives aux citoyens. Certains pensent que le gouvernement français a organisé les attentats du 13 novembre pour faire passer la loi renseignement ensuite.

 

 

Rédigé par hl_66

Publié dans #Réflexion

Publié le 9 Septembre 2018

 

 

BIEN-ÊTRE - L'anxiété est universelle. L'American Psychological Association la définit comme "une émotion caractérisée par une sensation de tension, des pensées anxiogènes et des changements physiques, comme l'augmentation de la tension artérielle". La plupart des gens en feront l'expérience au moins une fois dans leur vie.

Elle est tellement banale que beaucoup la voient comme un aspect normal de leur vie, et l'ignorent au lieu de la traiter avant qu'elle ne s'aggrave. Pourtant c'est un vrai problème: sans traitement, l'anxiété peut devenir invalidante et provoquer des étourdissements, des nausées, des maux de tête, des douleurs d'estomacs et des crises de paniques, entre autres symptômes qui rendent potentiellement impossible l'accomplissement de tâches quotidiennes même simples.

Heureusement, il existe plusieurs façons de combattre le sentiment écrasant d'anxiété lorsqu'il se présente. La psychothérapie, les médicaments ou une combinaison des deux peuvent être vitaux si l'anxiété vous empêche de vivre normalement au quotidien. Et, pour un apaisement rapide, les experts indiquent que des techniques de relaxation comme les mantras peuvent être très utiles.

Recourir à des mantras lorsque vous êtes aux prises avec l'anxiété a souvent un effet calmant, explique Chantelle Doswell, coach diplômée et maître de conférences dans le domaine de l'action sociale à l'université de Columbia.

"Les mantras aident les personnes qui souffrent d'anxiété de deux façons: ils permettent se concentrer sur quelque chose, et ils proposent des chemins de pensées différents des automatismes qui provoquent l'anxiété", nous dit-elle.

La technique est souvent si efficace que les thérapeutes et les professionnels du bien-être, qui les recommandent à leurs patients et clients, y ont eux-mêmes recours. Le HuffPost a consulté quelques-uns de ces spécialistes pour connaître leurs mantras favoris en cas d'anxiété.

La prochaine fois que vous vous sentirez étouffé, essayez l'un de ces mantras. Ils vous aideront à dépasser une situation difficile et à retrouver un état de calme intérieur.

1. "Je suis..."

Commencez une phrase par "Je suis..." et complétez-la par un adjectif de votre choix. Bri Luna, fondatrice et créatrice de The Hoodwitch et experte en bien-être spirituel, aime particulièrement les affirmations: "Je suis patience", "Je suis compassion", "Je suis sagesse", "Je suis amour", "Je suis générosité", etc.

Elle témoigne: "J'ai découvert que ces affirmations très courtes ont un effet bénéfique lorsqu'elles sont répétées lentement trois par trois."

Katiuscia Gray, psychologue clinicienne à New York, recommande également ces phrases pendant une période de stress. On peut, par exemple, utiliser: "Je suis en paix" ou une phrase qui nous rappelle que nous ne sommes pas en danger.

2. "Tout finit par passer"

D'après Diane Sherry Case, coach littéraire et coach de vie qui enseigne aux thérapeutes à intégrer l'écriture dans leur pratique. "Lorsque nous sommes dans les affres de l'anxiété, nous nous persuadons souvent que cela va durer éternellement et nous paniquons encore plus".

C'est pourquoi il est important de se rappeler que ce moment de panique ne va pas durer. C'est là qu'arrive ce mantra.

"Répétez: 'Tout finit par passer' au rythme de votre respiration", conseille-t-elle.

3. "Je suis fort(e) et je mérite tout ce qui me rend fort(e)"

Choisissez votre affirmation en fonction de vos besoins du moment. "Selon le client, je modifie les mots: 'Je suis ________, et je mérite tout ce qui me rend __________', explique Markisha Bennett, psychologue à Washington.

Cela donne, par exemple: 'Je suis une belle personne et je mérite tout ce qui me rend beau/belle' ou 'Je suis fort(e) et je mérite tout ce qui me rend fort(e)'."

4. "Ce qui est en jeu, ce n'est pas moi"

"Ce mantra peut être d'une grande aide dans les moments où vous vous inquiétez de ce que les gens pensent d'une présentation ou de ce que vous faites", indique Joy Harden Bradford, psychologue à Atlanta et fondatrice de Therapy for Black Girls.

"Parfois, je suis stressée par la diffusion d'un nouvel épisode de mon podcast ou d'une nouvelle vidéo; je m'inquiète de l'accueil qui leur sera fait. Me rappeler que cela n'a rien à voir avec moi, et tout à voir avec les personnes qui ont besoin d'entendre ce que j'ai à dire m'aide énormément", précise-t-elle.

5. "Tout va bien"

Parfois, nous avons simplement besoin d'un petit rappel (que l'on répète plusieurs fois) que tout ira pour le mieux.

Maryam Hasnaa, qui anime des ateliers et des cours en ligne sur la spiritualité et la conscience, nous fait part de sa pratique: "Les mantras que j'utilise quotidiennement sont en arabe. Dans ma culture, nous chantons certains mots empruntés aux Écritures. Sinon, le mantra que je dis religieusement et automatiquement, c'est: 'Tout va bien'."

6. "Merci"

Sherry Case recommande également de reconnaître les bonnes choses dans nos vies lors des moments de stress en répétant: "Merci."

D'après elle, "détourner l'esprit de nos inquiétudes et le diriger vers la gratitude aide à se sentir plus ancré". Se répéter: "Du calme" tout en inspirant profondément peut être efficace lorsque l'on ressent de l'anxiété.

 

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Se répéter: "Du calme" tout en inspirant profondément peut être efficace lorsque l'on ressent de l'anxiété.

 

 

7. "Je suis calme".

Dire à une personne anxieuse de se calmer est inefficace, mais se le répéter à soi-même tout en prenant de grandes inspirations peut être utile.

"Respirer en comptant jusqu'à 4 au rythme de JE-SUIS-CAL-ME, sur l'inspiration puis l'expiration est mon exercice de base lorsque je me sens physiquement anxieuse", révèle Chantelle Doswell.

8. "Je mérite d'être aimée"

Selon elle, "cette phrase est particulièrement importante lorsque l'on se sent stressé(e) ou paniqué(e) à propos d'une personne qui nous est chère".

"Pour moi, qui suis anxieuse dans mes relations proches, je trouve utile de me répéter des phrases comme: 'Je mérite d'être aimée' ou 'Ca n'a probablement rien à voir avec toi. Sois patiente et curieuse' lorsque l'anxiété commence à monter."

9. "Que vais-je vivre et voir aujourd'hui qui va me ravir et m'émerveiller?"

Concentrez-vous sur quelque chose de positif plutôt que négatif.

Brandi L. Bates, auteure et animatrice de Power Podcasts sur la pleine conscience et la positivité, ajoute: "Je me pose cette question littéralement en boucle. Si j'ai une journée particulièrement difficile, je suis plus spécifique. Que puis-je voir d'autre? Que puis-je lire, goûter, toucher, humer et ressentir aujourd'hui qui va me ravir et m'émerveiller? Qu'est-ce qui fera de ce jour le plus beau de ma vie?"

Cet article, publié à l'origine sur le HuffPost américain, a été traduit par Clara Berut-Lhopital pour Fast for Word.

Rédigé par hl_66

Publié dans #Réflexion